Les fiançailles et le mariage dans la région de Sétif
Le territoire de Sétif est varié ; bordé de verdure et de déserts à la fois ! Ce cadre unique a sans doute façonné les mœurs de cette localité.
Le mariage y est célébré avec faste. Autrefois, le choix de l’épouse était ritualisé, on n’épousait pas qui on voulait ! La future épouse était choisie par les parents des futurs époux, il s’agissait de mariages d’intérêt. Une fois les fiancés choisis, on commençait les préparatifs du mariage.
Dès lors, on recherchait un lieu de réception des invités et on commençait les achats de la robe de la mariée, celle-ci, selon la tradition devant être faite sur-mesure, il ne fallait pas choisir n’importe quelle robe ! On décidait ensuite quels repas et quelles douceurs allaient être servis. Un couscous, une chekhchoukha, pour les plats, et des cornes de gazelle, un gâteau de noces, pour les douceurs.
La tradition dans cette partie du pays n’est pas d’envoyer des faire-parts mais de rencontrer les membres de la famille et les amis que l’on souhaite inviter. La cérémonie se déroule en plusieurs jours.
Les plus traditionalistes font appel à une personne appelée El berrah qui fait part de l'événement dans les souks et les environs invitant ainsi tout le monde à la fête. Aujourd’hui, il n’y a plus de mariages arrangés mais les coutumes du mariage sont restées les mêmes à Sétif.
El dafia
La cérémonie de la dafia consiste pour le marié à verser une dot et à équiper son futur domicile en literie, matelas et divers cadeaux pour la mariée ! Ces cadeaux s’appellent El djehaz ou choura.
Pour ce jour, les parents du marié achètent une brebis et d’autres produits pour préparer le repas de noces. Les femmes de la famille se chargent toutes de la préparation du dîner en psalmodiant des chants religieux.
A la fin du dîner offert par la famille du marié commence la préparation de la dafia. Un cortège d’hommes et de femmes vont chez la mariée les bras chargés de cadeaux, sa dot, le plus souvent une parure en or et d’autres cadeaux symboliques. Une fois que la mariée a reçu la dot, elle est emmenée dans la salle de cérémonie pour recevoir le henné sur les mains.
Bien sûr, les danses et les chants accompagnent chaque étape du mariage. Ensuite, les deux familles échangent les vœux de bonheur et tirent quelques coups de fusil en l’air, comme le veut la tradition du baroud. Après chacun rentre chez soi en attendant le cortège du mariage, qui doit avoir lieu le lendemain.
Le jour du cortège
Ainsi, après avoir égorgé les brebis et préparé la nourriture, commencent les préparatifs du cortège. Celui-ci peut-être fait de voitures ou de chevaux. Le cortège part le matin lorsque le domicile de la mariée est éloigné de celui du marié ou l’après-midi si ce n’est pas le cas.
Maquillage et habillage de la mariée
La mise en beauté de la mariée est assurée par des femmes qui ont l’habitude des mariages. Elles maquillent la mariée de préférence avec des produits locaux comme le khôl et l’aident à s’habiller avec les plus belles robes. Pour mettre en valeur ses belles robes, la mariée porte des bijoux : colliers, bracelets aux deux bras, boucles d’oreilles, diadème ou bijou de tête fin. La mariée est recouverte d’un voile, le hayek, de façon à ne pas être incommodée par les regards indiscrets.
Partir ramener la mariée
Cette opération nécessite un cortège constitué de chevaux, souvent préparé dès le matin, après le déjeuner… Le cortège est dirigé par le père du marié ! Pendant les préparatifs tout le monde chante, mais il est de coutume de chanter une chanson différente quand la mariée arrive et quand elle part de chez son père. Quand elle arrive on chante Al aroussa jat, la mariée est venue et lorsqu'elle part de la maison de son père on chante Kharjet min dar babaha par exemple.
Arrivé au domicile de la mariée, le cortège se repose autour d'un café et quelques gâteaux, puis emmène la jeune mariée jusqu’à sa nouvelle demeure dans un climat de gaieté. Il est d’usage que la famille de la mariée montre sa tristesse à l’idée de perdre sa fille alors que celle du marié exprime sa joie à l’idée d’avoir une fille !
Le père du marié accompagne sa belle-fille jusqu'au cortège, elle monte sur le cheval et prend place dans un baldaquin en gardant toute sa beauté et sa splendeur avec son voile sur la tête.
Une tradition amusante consiste à ce que le frère de la mariée (si elle en a) retienne les rênes du cheval jusqu’à ce qu’il estime que les invités lui aient donné assez d’argent ! Après avoir donné sa bénédiction, le cheval peut s'en aller.
Après avoir traversé la distance séparant le domicile familial de la mariée de sa nouvelle demeure, le cortège arrive dans une ambiance toujours très festive au rythme de chants et des coups de fusils, pendant que les enfants se précipitent sur les gâteaux et douceurs jetés au préalable par une vieille dame sur le cortège.
Le beau-père accompagne la mariée jusqu'au seuil de son nouveau foyer. A ce moment précis, une des proches du marié (le plus souvent sa tante), arrose le sol d’eau de rose afin d'éloigner les esprits maléfiques, ensuite la main droite de la mariée est badigeonnée de smen (un beurre fondu) qu'elle essuie au seuil de la porte avant de rentrer dans la cour et rejoindre la place qui lui est spécialement réservée.
Pendant ce temps, à l'extérieur et sur la place publique est organisée une compétition entre les hommes et les femmes, qui consiste à suspendre un chiffon rouge au bout d'une canne portée par une femme et qui doit être atteint par les coups de fusils tirés par les hommes.
Faute d'atteindre la cible, les hommes auront honte et tout le monde rira.
Fin de la cérémonie
Après quoi les femmes s’attellent à la préparation du dîner alors que les hommes se chargent d’accueillir les invités ; les enfants eux, ont juste à chanter et à danser parmi les invités, devant la mariée assise sur une chaise majestueuse.
La fête continue jusqu'au dîner où est servi le couscous avec la viande et les légumes dans des plats en terre typiquement algériens, les guesaa. Certains servent une chekhchoukha (voir photo) permettant aux invités de déguster de copieux repas. Il est de coutume de servir d’abord les hommes puis les femmes enfin les enfants. A la fin du dîner commence la préparation de l'incontournable cérémonie du henné qui fait partie intégrante du rituel du mariage traditionnel algérien.
La fête du henné
La préparation commence juste après le dîner, avec l'intervention de deux préposés au henné (wasfans ) en mettant en place le décor nécessaire à ce rituel. On installe alors un tapis décoré fait en halfa (paille), pendant que les femmes préparent le henné en chantant et en priant pour le bonheur et la réussite du marié.
A cet instant, le marié, accompagné de ses deux wasfans s’installe au milieu du tapis, et un vieux notable membre de la famille s'approche et lui met du henné sur la paume de la main.
Par la suite, la famille et les amis du marié lui présentent les félicitations et les compliments d'usage en lui offrant des cadeaux. Il peut s’agir d’une aide financière (Aoun), qui est annoncée publiquement et à haute voix par un "el berrah" qui indique le nom du donateur. Ce n'est qu'à la fin de ce rituel, que commencent les préparatifs annonçant la nuit de noces.
L'évaluation de la mariée et le départ de la maman
Le lendemain de la fête la mariée doit tôt le matin préparer des gheraief, sorte de pancakes orientaux, pour tester ses talents de cuisinière !
Poursuivant le rituel, la mariée met ses plus belles tenues et est apprêtée avec le meilleur maquillage pour être accompagnée par un groupe de femmes qui l'installent au milieu de la cour dans un endroit qui lui est consacré pour recevoir les félicitations et compliments d'usage.
Il est à remarquer que la mère de la mariée reste en compagnie de sa fille pendant quelques jours, à la fin desquels la famille du marié prépare ce qui est traditionnellement appelé "le retour de la maman" et même cela est ritualisé ; on lui offre des vêtements, un mouton, de la semoule afin qu’elle puisse préparer un repas à l'occasion de son retour. Ceci, constitue la dernière phase du mariage traditionnel dans la région de Sétif.