L'État algérien entend-il toujours les familles de la diaspora?

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Nous allons évoquer aujourd'hui l’histoire d’Ezzedine, le patron du bar-tabac de Corbeil-Essonnes assassiné en 2016.

Mardi 13 septembre 2016 à 20h50, Ezzedine, 40 ans, patron du bar-tabac jouxtant la mairie de Corbeil-Essonnes en région parisienne, est abattu de quatre balles tirées à bout portant, à l’intérieur de son commerce.

Le suspect, filmé par les caméras, est un voisin, ami intime de la victime. Il venait d’ailleurs chaque jour en terrasse, sur le parvis de la mairie. Le gérant du tabac de la mairie, de nationalité algérienne, passait ses rares moments de libre dans son jardin à arroser ses plantes ou dans la salle de musculation aménagée dans sa maison proche de son commerce.

Debout dès 5 heures du matin pour ouvrir à 6 h 30 et fermer à 20 heures, Ezzedine avait prévu de se calmer sur le travail car il attendait un heureux événement. Mais sa propre femme, enceinte, n’a pas pu, après cet incident, vivre chez eux dans la maison placée sous scellés…

Vendredi 16 septembre, un moment de recueillement en hommage à la victime, ouvert à tous, avait été organisé par ses proches au salon du funérarium situé au 104, boulevard de Fontainebleau à Corbeil-Essonnes. Une cérémonie a été prévue à 13 heures à la mosquée pour la victime.

Depuis ce crime affreux, tous les biens d'Ezzedine, la victime, ont été placés sous scellés par la justice. La femme du défunt était donc sans ressource. "La maison et le bar d'Ezzedine ont été bouclés, affirme un ami du gérant. Le commerce d'Ezzedine situé place de la mairie avait été ouvert en 2008. Ses proches n'ont même pas pu prendre leurs vêtements.".

Les avoirs ont été gelés aussi à titre conservatoire, durant le temps de l'enquête, de ce fait la famille ne pouvait absolument pas payer les frais de rapatriement du patron de bar, Ezzedine. La famille du gérant a donc demandé au consulat d'Algérie situé à Créteil (Val-de-Marne) et dont dépend l'Essonne, de prendre en charge le rapatriement du corps d'Ezzedine comme la loi de finances de l'Etat algérien le prévoit depuis 2015.

Mais le consulat de Créteil a refusé. "La loi instituant un fond spécial pour régler les frais de transfert des dépouilles des ressortissants algériens établis à l'étranger, est votée depuis près de deux ans, mais elle n'entre en application qu'en janvier 2017", détaille Otman Douidi, président de l'association des algériens résidant à l'étranger, qui a pris le dossier d'Ezzedine à bras le corps. "Mais il y a eu des jurisprudences, les consulats de Pontoise (Val d'Oise), de Nanterre (Hauts-de-Seine) et de Bobigny (Seine-Saint-Denis) ont accepté récemment de rapatrier des Algériens décédés", souligne Otman Douidi.

"Cette famille ne mérite pas ça!"

"Cela coûte 3000 €. Pour un Etat comme le nôtre ce n'est rien, et la Tunisie fait ça depuis 30 ans, reprend le président de l'association. Cette fois à Créteil, ils ne nous ont même pas écouté. C'est scandaleux.".  Contacté, le consulat d'Algérie à Créteil n'a pas "souhaité commenter cette affaire.".

Malgré tout, les proches d'Ezzedine espèrent encore. "Sa famille veut l'enterrer en Algérie pour qu'il repose près de ses ancêtres et parce qu'on ne veut pas que son corps soit déterré, comme cela peut arriver en France quand une concession arrive à échéance, indique un représentant de la famille. On ne sait pas qui sera là pour payer dans une génération ou deux.".

Détail sordide : chaque jour supplémentaire à la morgue a coûté près de 40€ à la famille…". Cette famille ne mérite pas ça, soupire un proche. Ezzedine c'était quelqu'un qui aidait tout le monde. Le cœur sur la main. Je me rappelle qu'il avait un client alcoolique, Jo. Il refusait de lui servir autre chose que du café. Et il s'est mis à gérer son argent pour éviter qu'il n'achète ailleurs de l'alcool ou que certains profitent de son état. A la mort de Jo, c'est Ezzedine qui a organisé une collecte, pour donner quelque chose à son fils.".

Cette affaire illustre le fait que l’État algérien n’entend pas toujours les demandes des familles issues de la diaspora algérienne…

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Mis en ligne : Lundi 14 Juin 2021
 
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